Mars 2023. Cela fait très exactement 10 mois que l'idée de l'Open Atre existe.
Enfin, au départ, il n'avait pas vraiment encore de nom.
En mars 2023, ce n'était encore juste qu'une hypothèse, une piste de partager une maison auprès de personnes qui pourraient avoir envie de travailler ensemble, et cela pour que nous puissions continuer à occuper la maison de ma grand mère, sur Brézins.
"Mais pourquoi des gens qui souhaitent se mettre à leur compte ou en télétravail auraient envie de payer pour retrouver un cadre de travail collectif ?"
Bonne question.
Est-ce pour cela que mes appels à coworkers ont fait un flop relatif ? Était-ce parce que les gens attendaient d'en savoir plus ? Peut-être un peu des deux.
On ne sait jamais trop quoi penser quand, après avoir créé un groupe de discussion facebook de télétravailleurs, il est impossible de savoir ce que les gens en attendent.
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| Les quelques messages postés sur facebook |
Il n'empêche que ces premiers pas ont permis de prendre des premiers contacts.
Et quels premiers contacts.
Il y a eu Elodie, qui nous a fait découvrir en accéléré toute la dynamique du territoire, qui a tâché de contenir le flou créatif en donnant des guidelines et qui nous a donné tous les bons contacts.
Il y a eu Fanny, qui discrètement, mais assidument, a donné des noms et a facilité des mises en relation.
Il y a eu Eric, qui quoiqu'il en dise, en alternant entre définition des personae et déménagement des étagères, sans compter les encouragements et le soutien, a boosté le projet en bonne et due forme.
Il y a eu Olivier, Nathalie, Raluca, Estelle, Yasmine, Julie et Philippe qui ont offert des premiers échanges, des premiers retours et des premiers points de vue. Et vraisemblablement qui continuent un peu d'en parler comme j'ai reçu certains contacts par le bouche à oreille.
De tout ça est ressorti l'idée que finalement, ce n'était peut-être pas de travailler ensemble que les gens ont envie. C'est de se rencontrer, de découvrir, de partager.
Certes.
Mais comment arriver à mobiliser des personnes partageant a minima des valeurs ou une vision de la vie communes, histoire de commencer avec un peu d'atomes crochus quand même ?
En discutant avec les uns et les autres, un trait d'union a fini par ressortir : celui du voyage.
Le voyage, qui nous pousse vers l'inconnu, qui est le signe d'une certaine curiosité, d'une certaine ouverture d'esprit et d'un certain désir d'exploration. Le voyage intérieur, pour mieux se connaitre. Et le voyage vers l'autre pour challenger ce qu'on sait.
Pas besoin d'aller très loin pour voyager ; l'important, c'est la manière de faire.
Résultat, changement de cap en juillet.
Le coworking, la maison se doivent d'être des outils pour répondre à une ambition plus large.
Mais laquelle ?
Quand l'objectif est flou, autant passer à l'action directement. La procédure notariale de transmission de la maison est achevée. Le déménagement débutera en septembre, le temps que les enfants et petits enfants récupèrent ce qu'ils souhaitent. A la rentrée, nous pourrons ouvrir la maison et accueillir les personnes plus ouvertement et plus confortablement (et communiquer un peu plus, aussi).
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| Nouvelle tentative : changement d'approche |
Vacances obligent, ce changement de cap n'intervient qu'en septembre, grâce à Roumaissa qui sert courageusement de cobaye au concept des repas partagés. Non seulement c'est la première fois qu'on tente l'expérience, mais c'est la première fois qu'elle tente ce plat pour autant de monde.
Une première doublement réussie.
Septembre, c'est aussi le premier contact avec les partenaires et financeurs potentiels qui permettraient de sécuriser la conservation de la maison.
S'ensuit le remplissage de trois gros dossiers : la candidature à alter incub pour bénéficier d'un accompagnement à la création de projet ; un dossier auprès d'une foncière pour étudier la faisabilité de son rachat de la maison ; un dossier d'ouverture ERP pour vérifier que nous sommes dans les clous en termes d'accueil du public.
Un mois de paperasse (près de cinquante pages rédigées et de tableaux remplis) et de réflexion pour essayer d'expliciter un peu le projet et mettre de l'ordre dans le bazar des idées.
Le temps passe vite et nous sommes déjà mi octobre.
Les mois de mars, avril, mai, juin, juillet et août passés à comprendre le territoire payent, cependant.
La connaissance des publics présents localement, de la dynamique du territoire, les premiers contacts avec les acteurs locaux, l'épluchage des diagnostics locaux et des politiques publiques donnent une certaine légitimité au projet.
L'idée de créer un lieu de rencontre à partir d'une maison d'habitation et de s'en servir pour faire du lien entre habitants et extérieurs plait par son caractère innovant.
Les lieux se prêtent bien à la superposition des activités.
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| Les activités prévues dans les pièces de la maison |
Mais ce n'est toujours pas un projet collectif.
Pas vraiment.
Il répond bien aux besoins locaux.
Mais quand je suis obligée de m'arrêter pour travailler sur mes missions, le constat est sans appel : le projet n'avance plus, signe que pour l'instant, je sèche dans la transmission et le partage du pilotage.
Le fait est que le temps manque.
Maman et moi nous sommes fixées le début janvier février 2024 pour savoir si le projet peut tenir le coup ou si il faut vendre la maison. Il faut enchainer les dossiers, prendre les contacts. Cette urgence n'est pas compatible avec le travail collectif, même si on sait que cette posture met le projet en danger.
Et nous pensons que ça ne sert à rien d'engager les gens si nous ne pouvons pas leur garantir de garder la maison.
Mi octobre, nous faisons partie des 7 candidats sélectionnés par Alter Incub parmi 20 pour venir présenter notre projet. Moment de stress général... Et petite déception car nous ne faisons par partie des 3 candidats retenus.
Mais nous sommes sélectionnés néanmoins pour une autre formation qui me permettra de prendre du recul sur la manière de procéder.
Concernant les autres dossiers, avancée positive concernant l'ouverture au public, sur laquelle nous sommes exemptés de contraintes du fait que la maison reste dédiée au logement.
Et désillusion suite à la réponse de la foncière qui propose de racheter la maison pour un loyer astronomique sur 67 ans.
Coup dur. La possibilité de garder la maison nous semble désormais très lointaine. Inatteignable en fait.
Quelque part, nous faisons à nouveau notre deuil, pour la seconde fois.
Mais c'est dommage de tout laisser en plan pour autant : les gens, les idées, l'état d'esprit...
Résolution est prise de continuer les activités tant que nous avons la maison : cela peut servir à ceux qui veulent tester des activités et des animations, et c'est autant de bons moments à partager qui peuvent apporter à d'autres et à graver dans notre mémoire.
Résolution est prise aussi de prendre enfin le temps de consulter ceux qui le souhaitent pour savoir finalement ce qu'ils attendaient du projet et réfléchir à comment, même sans maison, on peut mettre quelque chose en place ensemble.
Le 14 décembre, nous nous retrouvons en petit comité pour reprendre pas au début, mais presque, et poser enfin la question : mais au fait, vous, qu'est-ce que vous attendez de ce projet ?
Forcément, c'est toujours ce qu'on se dit après coup, mais je me demande pourquoi on n'a pas fait ça plus tôt.
Savoir que ce que l'on fait est utile aux autres, c'est le moteur principal dans des gros projets, quand la motivation personnelle ne suffit plus.
Les échanges sont riches, venant mettre des mots sur des idées et des hypothèses qui soudain prennent tout leur sens. Les pièces du puzzle s'assemblent.
Les regards extérieurs, ceux de Mélissa, d'Eric, d'Emilie, de Didier, nous ouvrent d'autres perspectives, des questions, notamment sur la maison, qu'on ne s'était pas encore posées.
De nouvelles portes s'ouvrent.
Le pire, ce n'est pas la fin de quelque chose ou de quelqu'un. C'est quand il n'en reste plus rien.
Et nous venons de prendre conscience que quoiqu'il arrive, il restera quelque chose de tout ça.
Aujourd'hui, rien n'est gagné, mais nous savons vers où regarder.
Il y a ce projet d'association, qui maison ou pas, promet de belles réflexions.
Il y a alterincub, qui nous incite à candidater à nouveau, signe d'un intérêt certain pour le projet.
Il y a ces quelques mois début 2024 qui promettent d'être riches en rencontre et en expérimentation.
Et il y a peut-être un rabattement des cartes à venir.
Quand on s'est lancé dans le projet, on s'attendait à ce que ça ne soit pas de tout repos.
Mais il n'empêche que quand c'est les montagnes russes émotionnelles, chaque petit mot, chaque petite idée, chaque explication endiablée d'un escape game tiré par les cheveux fait du bien.
Merci encore à tous (y compris tous ceux et celles que je n'ai pas cité qui ont pris contact à partir de juillet, et la famille) pour votre présence, et votre appui, même ponctuel. C'est ce qui nous a permis d'arriver jusqu'ici.
Belles fêtes de fin d'année.
Et la suite au prochain épisode.
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